Depuis quelques mois, on a vu se mettre en place, un nouveau système de tractations par lequel Ennahdha d’une manière manichéenne offre à tous les caciques et les pourris de l’ancien régime la possibilité de se refaire une virginité à la condition de prêter allégeance. Qu’est ce que quelques malversations et quelques milliards de perdus pour le pays, face à l’expertise et le know how qu’un Hédi Jilani, par exemple, peut apporter aux “nouveaux maîtres du pays”? Il faut être véritablement naïfs ou particulièrement “croyant” pour penser que l’apport d’un Abdelfateh Mourou à sa défense et à la récupération de “ses biens” est uniquement légale.

Si le gouvernement Tunisien aujourd’hui, surtout dans sa composante Nahdhaoui ne cesse de nous rappeler qu’il est issue des urnes, force est de constater qu’il est surtout marqué par ses années de clandestinité ou de prison et que par conséquent, il est surtout emmuré dans une paranoïa qui lui fait perdre toute lucidité. Chaque jour qui passe ne fait que mettre en avant un comportement et un état d’esprit totalement… Zabaesque.

Alors que le weekend n’est pas totalement fini et au moment ou l’affaire Sami Fehri et ses marionnettes fait le buzz et devient l’ultime preuve que la liberté d’expression est en danger en Tunisie, voila qu’un artiste, un fou du roi vient mettre son grain de sel et nous sort un joker de sa manche. Un joker dont lui seul a le secret.

Lotfi Abdelli, actuel détenteur du titre de symbole national de la liberté d’expression bafoué, poste une vidéo dans laquelle il fait son mea culpa pour ses errances passées lors de son one man show critique d’Ennahdha et ses dérivés et promet d’arrêter son spectacle. Il annonce dans la foulée que la fin de son spectacle ne veut pas dire la fin de sa carrière et qu’il prépare une nouvelle “œuvre” qui a défaut d’être 100% Hallal sera 100% anti-gouvernemental. Il donne même un avant goût des joutes à venir en affirmant qu’il ne serait pas étonné s’il finissait un jour dans une cellule de prison. Seulement voila! Pour un comédien de stand up, le sérieux et la gravité ne serve qu’à camoufler la chute comique qui souvent clôture le sketch. Il s’est simplement adressé à Lotfi Zitoun, le plus médiatisé et le plus agressif des membres du gouvernement, véritable chien d’attaque d’Ennahdha et de son oncle, le gourou Rached Ghannouchi en lui rappelant qu’il ne faisait pas très ministre mais que par contre, il ne pouvait être qu’une olive que l’on avale à l’apéro, une simple Kémia!

Crime de lèse-majesté commis par un bouffon effronté envers des gouvernants “moralisateurs” qui pensent sincèrement avoir une légitimité infinie issue des urnes et conforté par un droit divin.

Il ne s’en est pas fallu de beaucoup pour que dans le camp des démocrates pessimistes, on voit dans l’acte et le message de Lotfi Abdelli des conséquences identiques à l’affaire Sami Fehri. C’est à dire qu’il finirait aussi en prison.Après tout ce gouvernement a démontré une célérité exceptionnelle à réprimer la liberté d’expression en mettant des directeurs de média en prison et annonçant clairement qu’ils étaient des criminels avant même qu’un quelconque tribunal ne s’en charge et tant pis pour la présomption d’innocence. On en arriverait même à regretter que les tueurs des martyrs de la révolution ne soient pas des journalistes ou des gens de médias. Il y a fort à parier que justice aurait été faite, depuis un moment déjà.

Seulement voilà; Lotfi Abdelli est une autre paire de manches. C’est un troubadour fou et sympathique qui le premier, a spontanément brisé le carcan de la peur en s’en prenant à ZABA avant même qu’il ne s’enfuit. Souvenez vous qu’il était le premier à utiliser l’expression emblématique “dégage” et l’avait même traité de yaourt périmé. A croire que les seules références de Lotfi viennent de l’industrie agro-alimentaire.

Dans l’imaginaire populaire, Lotfi est une sorte de Robin des bois qui a plus de légitimité que n’importe lequel des néo-révolutionnaires qui étaient planqués à Londres et qui n’ont rien vu arriver tellement ils étaient occupés à envoyer des messages au dictateur, par le biais de son gendre Sakhr El Materi, pour lui dire qu’ils étaient gentils et qu’ils étaient prêts à collaborer avec lui.

Lotfi est surtout un self made man qui n’a réussi que grâce à son talent et cela contre toute attente et malgré un environnement social de départ des plus difficiles. N’oublions surtout pas qu’au delà de son rôle de trublion et d’électron libre, Lotfi a aujourd’hui derrière lui une jolie carrière de cinéma qui lui a valu quelques prix internationaux et surtout un CV d’acteur qui mobilisera très vite la communauté artistique internationale au premier coup de semonce. Il suffit de voir les méthodes de ce gouvernement pour comprendre qu’ils ne sont finalement que les enfants illégitimes de Ben Ali (encore lui). Et comme lui, ce sont des pleutres qui reculent à la première poussée qui a lieu sous les projecteurs.

Finalement, s’il est difficile de prouver avec certitude que Lotfi Zitoun n’est pas une kemia, on peut affirmer sans grand risque de se tromper que Lotfi Abdelli n’est pas un cachet d’aspirine. Il n’est  pas facile à avaler et il ne garantit aucunement la fin des maux de tête.

Hisham Ben khamssa

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