Zembra

Elle se rappelle lorsque toute petite encore elle voyait sa mère se parer de mille lumières pour un mariage : ses “ouech ouech” et ses “mahboub” fascinaient la fillette. Et puis un jour, elle découvre l’île de ses origines, Djerba. Elle retient un détail de taille. Pendant les fêtes, les bijoux ourlent le front, les oreilles, le cou, le buste, les poignets, la taille et les chevilles des femmes. Ces objets de séduction superbes et tellement riches qui permettent aux dames de briller de partout sont en or, en argent doré, en argent rehaussé de perles, de coraux…
Toutes ces images n’abandonnent jamais l’esprit d’Amel Henchiri y compris lorsqu’elle poursuit ses études supérieures en sciences économiques. Son diplôme en poche, la jeune femme tente un coup de poker : orienter sa carrière vers la création et la fabrication de bijoux. Elle part alors vers la Belgique où elle s’inscrit dans une école spécialisée. Son désir est légitime, elle veut avant de lancer sa propre griffe, maîtriser tous les aspects du métier, savoir dessiner un modèle, laminer, marteler, couper, souder un matériau.

De retour en Tunisie, Amel s’engage dans un domaine peu commun : la récupération de bijoux anciens destinés à la casse parce que passés de mode auxquels elle décide de donner une nouvelle chance. Une autre vie. Sauvant ainsi de l’oubli un patrimoine précieux. Se laissant emporter par ses intuitions esthétiques, ses émotions et des images puisées dans les revues en papier glacé et les impressions de voyages l’artisane mêle ces pièces anciennes à une myriade de pierres précieuses et semi-précieuses.
Sa boutique, enfouie dans une galerie commerciale à la Marsa porte le nom de sa marque, Morjana. Elle attire des clientes férues de pièces uniques cherchant à relever leur look d’un zeste de fantaisie, de grâce et de couleurs. La jeune femme est également très vite repérée par l’Office national de l’artisanat qui lui prodigue aide et soutien et l’invite à exposer dans ses divers salons.

Ces dernières années, l’artisane s’est mise à lancer des collections à thèmes. La mode la stimule beaucoup. Ainsi a-t-elle crée il y a quelques temps une série turquoise et une autre en noir et blanc. Sa dernière collection puise dans le patrimoine kabyle revisité à la manière d’Amel. Puisque la jeune femme mélange nos belles chaînes rihana d’antan aux petites boules ciselées et garnies d’émaux aux couleurs vives, le bleu turquoise, le vert émeraude, le rouge corail, qui caractérisent le bijou kabyle.
Nouveau également chez Morjana : l’argent est couvert d’une fine pellicule d’or. Ce qui donne un aspect plus riche, un brin baroque aux pièces exposées actuellement à la boutique de la Marsa et dont l’explosion de couleurs est due essentiellement à l’utilisation de perles, de lapis-lazulis, d’améthystes, d’onyx, de topazes, de turquoises. Mais aussi de beaux galets policés et d’ambre odorant.
Au fil des expositions d’Amel Henchiri un peu partout en Europe (Paris, Venise, Florence, Francfort), aux Etats-Unis (New York) et dans le monde arabe (Egypte), la notoriété de ses bijoux s’agrandit. Partout ses sautoirs, ses colliers, ses pendentifs, ses broches, ses bracelets rencontrent un bel accueil grâce à leur authenticité et leur modernité. Et pourtant la jeune femme garde les pieds bien sur terre. Modeste, elle affirme : « Créatrice de bijoux ? Non, je ne me définirais pas en ces termes. Notre patrimoine dans ce domaine est tellement fertile en formes, motifs et styles. Je ne fais que porter un nouveau regard sur ce fonds inépuisable et ramener une nouvelle lecture de la tradition ».
Nozha Gritli

Détails:

Zina , Tunis Sidi Bou Said

Adresse: Galerie Morjana. Centre Zephyr, 2ème étage. La Marsa, Tunis.

Founoun. Port de Yasmin Hammamet.Hammamet, Tunis

Description: Originaire de l’île de Djerba, Amel Henchiri s’est approprié le métier de la bijouterie traditionnelle. A la base de sa démarche, une idée féconde : récupérer des bijoux d’argent brisés ou endommagés promis à la fonte, que l’Office de l’artisanat recueille pour fournir en matière première les artisans traditionnels.
« Sauver de la destruction tout un savoir-faire ancestral, et des heures de travail minutieux » a été son objectif premier. Depuis de  nombreuses années, elle lamine, recoupe les plus beaux fragments, pour finalement les monter en colliers en leur adjoignant des matières semi-précieuses – jade, améthyste, cristal, perles ou corail. Elle s’attèle à cette tâche depuis maintenant plus de dix ans.
Un univers sensuel et lumineux qui imprègne des sautoirs, des colliers, des bracelets et des pendentifs. Les  créations de la jeune femme  s’inspirent du patrimoine kabyle qu’elle associe à des pièces traditionnelles tunisiennes. Des pièces modernes et précieuses où le travail à l’ancienne prend un nouveau relief. Une œuvre qui marie à la fois un travail d’orfèvre et la touche de l’artiste.

Plan de situation:

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