Syrine Ben Moussa est une des artistes préférées de 1001tunisie. Pour en savoir plus sur elle, l’élégante interprète s’est laissée aller au jeu des questions réponses sur ses goûts, sa ville natale, ses plats préférés… A Paris où elle vit, Syrine Ben Moussa donne des cours de Malouf tous les lundis soir au Centre Baudricourt dans le 13ème arrondissement de Paris.
Entretien conduit par Amel Djait

1001tunisie: Vous reprenez des cours d’initiation aux chants andalous à Paris. Dites-nous en un peu plus. Qui sont vos élèves ? Combien sont-ils ? Organisez-vous un spectacle à la fin de l’année ?
Syrine Ben Moussa: Mon cours est ouvert à toute personne passionnée par le chant arabo-andalou et par la musique d’une façon générale. Qu’ils soient débutants ou initiés, les élèves reçoivent un enseignement adapté à leurs attentes et à leur capacité vocale. Pour moi, le plus important est de transmettre mon amour et ma passion pour cette musique.

Concrètement, cela se passe comment?
Nous travaillons sur la respiration, la détente corporelle, le placement de la voix, la prononciation et la diction, mais aussi sur des aspects musicologiques simplifiés. Au-delà de la pratique vocale, je propose aux participants une traduction des textes avec des transcriptions phonétiques pour les non arabophones.
Nous abordons aussi la dimension histoire et théorie musicale.Le cours accueille douze personnes d’origines diverses et d’horizons différents comme des étudiants, des entrepreneurs, des retraités, des ingénieurs…
Ils sont tous amateurs, très appliqués et dévoués.Nous organisons depuis deux ans un concert de fin d’année dans une salle de spectacle parisienne où le groupe se fait accompagner par des musiciens professionnels.

Vous avez donné un superbe spectacle « De Séville à Tunis » cet été durant le Festival de Carthage. Comment s’est passé le concert ? Quel souvenir en gardez-vous?
« De Séville à Tunis » est un projet artistique qui réunit des musiciens des deux rives méditerranéennes à travers un métissage de musiques et de langues. Nous étions dix sur scène avec un trio flamenco de Séville, des musiciens tunisiens et un percussionniste algérien.Le spectacle fut une excellente expérience, d’autant plus que nous étions en ouverture du off organisé à la Basilique Saint-Cyprien. L’espace affichait complet avec un magnifique public de mélomanes.
J’étais ravie de pouvoir présenter ma création en Tunisie, après diverses représentations en Algérie et en France Paris, et surtout très heureuse de participer dans le cadre du prestigieux Festival de Carthage.

Quand vous êtes en Tunisie, quels sont vos endroits, saveurs et lieux préférés ?
A vrai dire, tout dépend des saisons. Cet été, mon coup de cœur était pour Korba. Il faut dire que la Tunisie est vraiment riche en paysages et en patrimoine.
Ceci dit, j’ai tout de même quelques rituels et souvent en solo: une ballade dans la médina de Tunis, un café turc à Sidi Bou Said, un sandwich tunisien et une brick à l’ancienne (brika bel warqa) au SafSaf à La Marsa. Mon programme inclut impérativement aussi un complet poisson à la Goulette en famille où j’aime beaucoup Le Café Vert et La Spigola.
Je suis vraiment une adepte de la gastronomie tunisienne et me réjouis d’avoir d’excellents restaurants tel que Le Dar el Jeld. L’année dernière, j’ai été agréablement surprise par Le café restaurant El M’Rabet. Mon invité français était aux anges !
Mon programme inclut aussi et surtout une escale à Testour.

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Et en termes de saveurs et de shopping ?
Je ramène tout de Tunisie : De l’huile d’olive, des épices, du couscous, du mhammes, nwasser, hlalem, mloukhiyya…
J’adore cuisiner et surtout partager et faire découvrir nos traditions.
Je me souviens que pour mon pot de thèse à la Sorbonne, j’ai organisé un buffet tunisien. J’ai tout exposé dans des plateaux en cuivres martelés achetés chez un artisan et rajouté des cartons avec des descriptions pour chaque met et boisson. J’ai aimé expliquer nos pâtisseries traditionnelles, les banadhej, les mini fricassés, les mini tajines, la boutargue, les verrines d’assida, le sirop d’orgeat et de pistaches, les liqueurs…

Vous êtes native de Testour. Quel est le meilleur plan pour visiter la ville ? Avez-vous des adresses préférées à partager avec les lecteurs de 1001tunisie?
Je suis originaire de Testour et très fière de mes origines mauresques. Il y’a pas mal de choses à visiter notamment la grande mosquée et la maison de Habiba Messika.
Fondée en 1609 par des réfugiés mauresques, Testour est riche par son terroir, sa culture, son histoire et son architecture ancestrale. La ville abrite plusieurs monuments (mosquées, Zaouias…) et se distingue par un artisanat riche et diversifié : tissages (Jebba, Kachabia, mergoum…), poterie et matériaux de construction (tuiles, briqueterie…), industrie artisanale fromagère…
Testour est aussi du fief du Malouf et de la musique arabo-andalouse en Tunisie.

Et en termes de cuisine ? Quelles sont les spécialités de Testour ?
A Testour, vous pourriez déguster d’excellentes grenades et de succulents abricots !
Nous avons un patrimoine culinaire très riche comme les “banadhej” avec une farce à l’agneau safrané, les “kisales” (à base de semoule et de fromage), le “sfenj” (sorte de beignets préparés lors des cérémonies), les pâtes traditionnelles au safran et à la viande d’agneau pannée au fromage “maqrounet labari” ou encore la “marqa hlowa” qui est un ragoût sucré-salé aux pruneaux et fruits secs !

zaghouan1Pouvez-vous nous raconter l’histoire de la chanson “Ya tounes”
Je l’ai écrite et composée au moment de la révolution en 2011. Je n’avais jamais écrit auparavant mais j’avais un énorme besoin d’extérioriser mes angoisses.
J’ai eu le déclic pour la mélodie, une heure avant mon passage sur radio France Culture, le 21 janvier 2011. L’émission était dédiée à la Tunisie et le Live était très émouvant. Les musiciens ont accepté d’improviser et de m’accompagner. C’était magique !

(Pour écouter Ya tounes:

Que pensez-vous de la situation politique en Tunisie ? Etes-vous déçue de la révolution?
Déçue des promesses non tenues! Déçue qu’il y ait tant de divisions et de haine. Malheureusement, la soif du pouvoir est plus forte que les idées chez certains. Mais bon, il faut être confiant et optimiste. Nous avons tout de même beaucoup de compétences dans ce pays et nous y arriverons !

Que pensez-vous de la scène artistique musicale tunisienne ? Quelles sont les principales voix que vous appréciez?
La scène artistique est marquée par l’émergence de nouveaux projets. Je suis très contente de certaines réussites musicales telles que « Ziara » de Sami Lejmi, « Parfums » de Mohamed Ali Kammoun, « Safar » de Imed Alibi ou encore « Fallaga » de Nasreddine Chebli.
Sinon, je suis très sensible et nostalgique aux classiques comme les grands de la chanson tunisienne comme Naâma, Oulaya, Ali Riahi, Jouini…

Quels sont vos projets pour l’année 2017?
Côté musical, je viens d’avoir une proposition pour la direction artistique d’un grand festival parisien et travaille également sur une nouvelle création.
2017 sera une année studieuse. Je prépare un MBA en e-business, après un Doctorat en Musicologie et un Master en Gestion de patrimoines audiovisuels et numériques.