Comment en êtes-vous venu à vous intéresser aux plantes médicinales de Tunisie ?
Je m’y intéresse depuis toujours. Par tradition familiale probablement. Lorsque j’étais petite, à Sfax, ma famille s’est toujours soignée en ayant recours aux plantes médicinales locales. Nous étions proches de la nature et de ses bienfaits comme la plupart des Tunisiens avant les années 1960. Puis j’ai fait des études d’infirmière et ai travaillé en tant que surveillante générale à l’hôpital dans un service de psychiatrie. J’y ai alors vu les ravages que la médecine chimique était capable de faire aux personnes.
Puis, je suis tombée gravement malade, une maladie chronique qui m’a contrainte à prendre à vie un important traitement médicamenteux. Ce traitement était lourd de conséquences sur mon organisme alors, au fur et à mesure de mes lectures scientifiques et de mes connaissances en tant qu’infirmière, j’ai commencé à substituer ce traitement par un autre à base de plantes médicinales. Je me suis peu à peu sentie mieux.
Pourquoi Herbioart ?
Nous avons créé Herbioart avec mon mari qui est ergothérapeute et énergéticien il y a environ 13 ans car beaucoup de gens qui nous entouraient nous sollicitaient pour des préparations à base de plantes. Pourquoi ne pas créer alors notre entreprise d’herboristerie et de produits bien-être à partir de plantes. J’étais connue pour les élixirs, potions et liqueurs thérapeutiques que je préparais.
Actuellement Herbioart est une entreprise familiale qui emploie 9 personnes. J’y travaille avec mon mari, mon fils médecin et ma belle-fille pharmacienne.
Comment avez-vous acquis l’incroyable culture botanique que vous avez ?
Comme je vous le disais, pour une part par tradition familiale mais aussi en lisant énormément d’ouvrages scientifiques sur le sujet. J’ai acheté et fait venir des livres de tous les pays : Egypte, Arabie Saoudite, France, Allemagne… J’ai une immense bibliothèque sur le thème des plantes médicinales et de leurs vertus. Ma formation et mon expérience de plus de 35 ans en tant qu’infirmière m’ont bien évidemment donné une approche pratique de la question de la maladie et de ses symptômes.
J’ai fait plus de 300 communications et ai participé à de nombreux congrès et conférences sur ce sujet au côté d’experts internationaux, médecins, pharmaciens, botanistes…
Comment faire connaître ce patrimoine naturel en Tunisie et à l’étranger ?
Concernant la connaissance de ce patrimoine, il existe des associations qui ont des initiatives et communiquent pour valoriser ce patrimoine. Je pense à l’Association tunisienne des plantes médicinales ou encore à l’Institut national de l’agriculture tunisienne. Cependant ça reste encore très théorique, ça manque de projets concrets…
De mon côté depuis les années 2007, je participe à des émissions télévisées pour vulgariser les plantes et montrer des recettes concrètes de produits de beauté réalisées à partir de celles-ci. Actuellement j’interviens 15 minutes dans l’émission « Elik » de Mona Zouib sur la chaîne Watania 1 (le dimanche à 19h-rediffusion le mardi à 14h).
Si vous aviez un vœu concernant votre domaine d’activité et le patrimoine végétal tunisien ?
Il faudrait déjà en Tunisie que l’agriculture et le métier d’agriculteur soient considérés et valorisés. Notre pays a besoin de tous les corps de métiers. Or dans les années après l’Indépendance, Habib Bourguiba a tellement valorisé l’enseignement et les études supérieures qu’actuellement tout le monde veut devenir médecin, architecte, ingénieur ou enseignant au détriment d’autres professions. Cela a pour conséquence des filières surpeuplées et un taux de chômage record dans celles-là. Par contre, nous manquons, par exemple, d’agriculteurs qualifiés. D’où cette perte de connaissance de la terre, de la nature et de ses bienfaits. Il faudrait également que le ministère de l’agriculture soutienne les petits artisans et producteurs d’huiles essentielles et d’eaux florales en leur permettant d’avoir accès aux denrées non ligneuses de nos forêts. Chaque année une vente aux enchères a lieu au ministère de l’Agriculture afin de céder momentanément, pour exploitation, des parcelles de forêts étatiques. Ce sont toujours les grands industriels qui raflent la mise pour exploiter au final qu’une partie infime de ces forêts (romarin, myrte).
Quelles sont d’après vous les plantes emblématiques de la Tunisie ?
Il y en a beaucoup mais je pense surtout au romarin, au chardon marie, au géranium rosat, à la fleur d’oranger, au Nesri mais aussi à l’ortie, au cresson, au pissenlit, à la mauve, à la bourrache, à la myrte, au pistachier lentisque, à la globulaire, etc. Ces plantes ont des vertus incroyables (anti oxydante, désintoxiquante, stimulation de l’ovulation, anti énurésie, antifongique…) et personnes, à de rare exception, ne les ramassent ou s’en préoccupent. La Tunisie est le 1er exportateur mondial d’huile essentiel de romarin. Si nous savions exploiter et valoriser toutes les plantes que nous avons comme le romarin, le pays aurait des entrées d’argent aussi importantes qu’avec l’huile d’olive. Mais attention, l’exportation ne doit pas être le cœur de cette démarche. Il s’agit certes d’exporter mais surtout de développer le marché local. Par exemple, à Herbioart (http://www.mille-et-une-tunisie.com/shopping/artisanat-a-tradition/3824-herbioart-les-bienfaits-de-la-nature-en-pot-tunis.html) nous avons des clients fidèles qui depuis 10 ou 15 ans achètent nos produits et sont à présent sensible à notre patrimoine végétale et sa préservation. Ils parlent à leurs amis de notre démarche et ainsi nous sommes connus de bouche à oreille.
Propos recueillis par AM
Herbioart
Faouzia Boulila-Ellouz
Menzah 6 – rue Saad b. Abi Wakas – UV4 Bloc 21 n°5 – Tunis
Site : www.herbioart.com – E-mail: bienetretraditionnel@yahoo.fr
Tél.: (+216) 22 710 766 / 71 230 219
{mainvote}