Le second rassure les professionnels en réaffirmant que le secteur est vital, important, incontournable, qu’il représente 7% du PIB, emploie 400 mille Tunisiens et fait vivre près de 2 millions de Tunisiens… Bien. Cela tout le monde le sait. Tous ne cessent de rabâcher les mêmes chiffres, problèmes, diagnostics et analyses. Allons-nous finalement nous occuper de ce secteur ou pas ?

Que ceux qui veulent en faire une version plus « hallal», ceux qui parodient les diverses études qui ont été réalisées et ceux qui reconnaissent leurs échecs se résignent à une seule urgence. S’y mettre pour raviver le tourisme tunisien et au plus vite. Tous les partis qui vont arrivés au pouvoir ou pas  veulent faire de chaque cm2 du pays une destination touristique. Alors réjouissons-nous !

Au lendemain de son arrivée, le ministre du Tourisme et du Commerce du Gouvernement de transition a mis au placard la stratégie 2016 sous prétexte qu’elle n’était pas assez révolutionnaire. L’a-t-il remplacé pour autant ? Ce n’était pas, selon lui, son contrat. Qu’a cela ne tienne ! Il se devait de remettre la machine en marche et il a échoué. D’ailleurs qu’importe, c’est du passé. Sauf que c’est un passé lourd qu’il faut empêcher de peser sur la prochaine saison. A ce jour, diverses prévisions augurent déjà d’un « bis repetita » si l’on ne prend pas les mesures qu’il faut et dans l’urgence.

Un “bis repettita” de l’échec de l’année touristique 2013

Du côté des professionnels du tourisme, on souffre en silence. Même les plus bruyants semblent peu engagés pour sauver leur secteur. Les grèves attendues quoique légitimes semblent complètement incongrues en pareil conjoncture. Les partis politiques qui se discutent les portefeuilles réalisent assurément la hardiesse de la tâche qui les attend. Une prise en main efficace et à peine quelques semaines sont nécessaires pour trouver des solutions et tenter d’amenuiser les pertes en emplois.

La stratégie 2016 du tourisme tunisien a été payée un million de dinars par les contribuables. Tous les partis politiques, sans exception, s’en sont inspirés pour leurs programmes. Ils l’ont imité, charcuté, pompé, maquillé et recousu. Tous, y compris la gouvernance actuelle, y ont fait leur propre marché. Est-ce pour autant le sésame qui va secourir le secteur ? Pas forcément. Elle a au moins un mérite. Elle est prête et l’on s’accorde sur son pragmatisme et son immédiateté.

A l’heure actuelle, on ne peut que remettre cette étude sur la table, en comblant partiellement ses lacunes. S’il fallait refaire l’étude Roland Berger, comme le propose Ennahdha, ce serait perdre du temps et de l’argent que nous n’avons pas.

L’année 2011 touche à sa fin et les prévisions pour les fêtes de fin d’année ne sont pas réjouissantes. Les contrats 2012 sont déjà signés ou en voie de l’être pour les retardataires. Que tous ceux qui veulent révolutionner le tourisme tunisien mettent un peu d’eau dans leur vin en différant leurs trop grandes ambitions.Le mieux étant parfois l’ennemi du bien, il s’agit d’abord de repositionner la destination dans l’échiquier des offres, d’aider les entreprises à rester en vie et de se pencher sur la libéralisation du ciel. Réconcilier les professionnels entre eux et avec leur secteur et leur administration est l’autre condition pour sauver le sauver. 

Si on laisse les choses en l’état, sous couvert que les priorités sont ailleurs et que le cas 2011 n’a pas réussi malgré les efforts et les moyens mis, 2012 sera irrécupérable. A ce jour, peu d’avions programment la destination Tunisie. A titre indicatif, 3 hôtels sur 13 sont ouverts à Tozeur où une population perd autant espoirs que confiance. A ce jour, l’Open Sky est relégué aux calanques grecques, les tours opérateurs observent passivement et aucune réponse sérieuse ne parvient à se faire via Internet malgré les sommes considérables qui ont été dépensées. Autant d’éléments alarmants sur la capacité de réagir de la destination. Les professionnels du tourisme et son administration sont-ils encore les fossoyeurs de leur propre secteur ?

A la veille de la constitution d’un gouvernement d’Union nationale ou d’un gouvernement composé de technocrates, nous sommes dans l’obligation de nous demander si cette dernière possibilité peut faire l’affaire ? Surtout pas. Du moins pour le tourisme. Le secteur a eu le temps de constater le désastre que s’est de se retrouver avec un ministre qui n’y connait pas grand-chose au secteur. A t-il préempté le secteur entre temps. Peut-être !

Surtout de l’expérience aux commandes

L’actuel ministre coiffe deux ministères et a passé beaucoup son temps à s’occuper d’un troisième, à savoir celui de la culture. C’est tant mieux pour l’avenir, mais pas assez bon pour l’immédiat. Vous l’aurez sans doute compris, l’actuel gouvernement aura fait une piètre prestation. Un exerciez qui a couté cher au secteur et dont la facture risquerait de s’alourdir s’il venait à se maintenir ou être remplacé par un autre technocrate.

Pouvait-on faire mieux ? Peu importe! Il s’agit de ne plus prolonger ni l’attentisme ni l’amateurisme. Mehdi Haouas est un bel orateur qui rassure et donne confiance. Il pourrait faire carrière dans la diplomatie mais aujourd’hui le tourisme a besoin de rassembleurs. Il a besoin d’expérience, de concertation et de solidarité.

Le tourisme tunisien pourra en deuxième temps renaitre de ses cendres s’il venait à devenir une priorité nationale pour tirer profit et dynamisme de tous les autres secteurs qui dépendent de lui comme le transport, l’artisanat, l’agriculture… Il a besoin d’action, d’innovation et d’audace.

Pour sortir de l’immobilisme et de l’attentisme et une fois débarrassé, du moins on l’espère, du clientélisme, il pourra s’essayer à de nouvelles voies y compris celles que propose Ennahdha avec un tourisme religieux, de shopping et culturel. Sauf que pour demain, il faut sauver les acquis en ne se risquant pas à mettre tous ces œufs dans le même panier. Aujourd’hui, le tourisme a besoin de pragmatisme. Il doit sortir sa tête de sous l’eau.

Amel Djait

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