Le PROJET MAGON est une découverte historico-gastronomique élaborée entre
la Sicile et la Tunisie du Nord. Une route transfrontalière pour valoriser les
patrimoines communs autour les deux rives de la Méditerranée. Cofinancée par l’UE, cette route s’inscrit dans la volonté de s’appuyer sur cette formidable et universelle culture qu’est le vin, pour s’ouvrir aux paysages culturels façonnés par l’Homme, aux nombreux mythes et légendes, mais aussi à l’économie nouvelle liée à cet engouement d’un public renouvelé. Par Pierre Gassin
Rappelons que Magon, le carthaginois, a écrit le premier traité d’oenologie, 700 ans avant JC, en langue punique. Traduit immédiatement en latin par les romains, ce traité a posé les bases du vocabulaire et des pratiques encore utilisées à nos jours.

Cette route des vins est constituée de nombreux points de découverte et surtout de rencontres : nous allons nous laisser guider par trois femmes de caractère : Amel Boukhris qui nous présente les joyaux du musée de Nabeul, puis Mila Lauretta, maîtresse de cérémonie au Château Neferis, qui nous fait découvrir des artistes et des produits de terroir, puis par Faten Belhadj, jeune oenologue qui accompagnera chaque met d’un vin raisonné.

La belle Amel est notre guide de la journée, elle nous accompagne et goûte avec nous les paysages, œuvres d’art et d’artisanat, les mets et les vins. Elle a sa façon toute attentionnée et délicate de mieux nous faire apprécier chaque histoire, anecdote, page de culture… Elle suggère, effleure l’histoire, sans jamais l’alourdir. Mais si vous lui posez la moindre question, elle devient intarissable.

Le petit musée de Nabeul est une structure récemment rénovée, très agréable. Malgré une taille modeste, l’on y trouve des trésors du bassin méditerranéen, entre mythes, légendes, objets uniques et mosaïques rares. Nous avons aimé les amphores, les sculptures en marbre fin de l’époque romaine, la collection de céramique sigillée, cette céramique du 3 ème siècle, avec son aspect quasi-neuf dû à sa méthode rare de fabrication. Nous avons été surpris par la description d’une véritable usine, ou fabrique à grande échelle, de poissons séchés. Et ce qui nous a épaté est la sauce garum, faite à partir de viscères de poisson, voire d’huîtres, en saumure, fermentées au soleil, puis passées à l’eau, à travers un chinois (passoire) pour obtenir un liquide aromatique… qui est étrangement similaire au Nuoc Mam vietnamien ! Il nous faudra chercher les chemins entre ces deux pays.

Mila, depuis 18 ans est la maîtresse de cérémonie de ce domaine traditionnel à dimension humaine et artisanale. Neferis est le nom punique de celle vallée de Grombalia, région agricole dense, riche de pratiques ancestrales et complémentaires, grenier carthaginois de la vigne, du blé et de l’olive. Ses 450 hectares sont répartis en 200 ha de vignes (viognier, chardonnay, muscat, syrah, carignan, cinsault) et 500 pieds d’oliviers. 50 ouvriers animent et entretiennent le corps de ferme aux 4 tours, un menzel à la française, une grange début 19 ème siècle, un chais de barriques de chêne, des cuves inox climatisées et un laboratoire contemporain ! Les techniques traditionnelles sont ici un assemblage de savoirs ancestraux, de techniques contemporaines et de recherches constantes du meilleur goût. Mais Mila met de suite en avant une richesse typiquement méditerranéenne, mixant la chaleur de son accueil, le magnétisme de son look unique, la somme d’informations artistiques doucement distillées tout au long de ses explications culinaires. Mila a la passion d’une sicilienne, qui a pris racine dans ce château, mais pour y faire découvrir des saveur de tous les terroirs de la Tunisie. Chaque ingrédient est choisi, en fonction de son origine, sa qualité, son authenticité endémique. Aux saveurs classiques, elle ajoute toujours sa note créative,
l’épice complémentaire et décalée, un savoir-faire révisé. Et quand on a presque tout goûté, la suite arrive, et encore et encore… Pour finir avec un incroyable couscous keffois. Quel magnifique tour du pays !

Mais Mila n’est pas seule pour orchestrer nos papilles et curiosités, elle s’est récemment entourée de l’expertise d’une oenologue: Faten. La jeune femme est un concentré de connaissances autour du vin, de sa conception à sa dégustation. Elle est le vin qui n’existe pas encore chez Neferis : un pétillant plein de rondeur ! Elle rit souvent, reste en retrait pour que chacun exprime ce qu’il ressent. Un plaisir de boire à ses côtés, on est rassuré, renseigné, accompagné.


Nos coups de coeur :
* Diamant rosé : le dernier né de la famille Neferis. Un rosé tendance, clair et sans amertume, de cinsault et grenache. Fruité intense, à base d’agrumes, puis des notes subtiles florales. Très sympathique.
* Magnifique blanc : chardonnay et muscat d’Alexandrie. Récolte manuelle, fermentation à froid en cuves inox. Un équilibre parfait entre ces deux cépages signatures.
* Selian blanc réserve : un chardonnay pur récolté à la main, pressé délicatement, et fermenté entre 11 et 13 mois en fût de chêne. Une splendeur d’équilibre complexe, de saveurs complémentaires. Un nez explosif de vanille, de fruits secs grillés, toastés. En bouche, il faut le laisser s’exprimer. Il vous surprendra par ses nuances minérales et son gras.
* Vieux Magnifique : mon coup de coeur de la journée. Un vin racé, franc, riche. Un vrai rugbyman : souple et large d’épaules ! Un nez prometteur, de fruits rouges, de vanille, de bois. La bouche suit : envahissement subit de pruneau, agrume, café, rancio. Son élevage à température pendant 18 mois en fût de chêne laisse la Syrah exprimer toute sa profondeur. Sublime

La dégustation
● Olives variété Beldi de Zaghouan séchées au soleil et aromatisées avec zeste de citron (non traité) et olives variété Picholine aromatisées aux graines de fenouil concassées et zeste d’orange (non traitée)
● Harissa nabeulienne aromatisée au gingembre ( proposition traditionnelle revisitée) avec de l’huile d’olive extra vierge pressée à froid (production privée de Maamoura)
● Pain fait maison à partir du blé autochtone variété Mahmoudi de Zaghouan et tabouna
traditionnelle de Nabeul
● Mini tartelettes de salade méchouia faite maison au pilon traditionnel (mehress)
● Crème grossière de mdames (fèves fraîches printanières) au cumin, décorées avec harissa et un filet d’huile d’olive extra vierge
● Keftas hout (boulettes de poisson à la mahdoise, à base de petits merlans frais, sans sauce)
● Fromages artisanaux: brebis de Béja et chèvre de la campagne de Sousse, accompagnés de miel (robb) de dattes de Nefta
● Ojjet mayou (tajine à l’harissa qu’on prépare au mois de Mai dans le Cap Bon) à base de
feuilles vertes d’arbres fruitiers de la saison ( figuier,mûrier,oranger,caroubier,néflier,figuier
de barbarie,olivier,laurier) et avec de l’ail beldi, thym et romarin
● Tajine warka : sept feuilles alternées par une farce d’oeufs fermiers (arbis), poulet, amandes, safran, cumin…
● « Hommage à la Sicile » (au côté sicilien de l’itinéraire Magon…) : pâtes « anellini avec une pistounade à base de basilic, huile d’olive extra vierge, tomatines séchées, câpres de Ghar El Melh, anchois de Mahdia, amandes, ail beldi
● Couscous borzguen du Kef (à l’agneau, pois chiches et fruits secs, épices…)
● Makroudh au sorgho de Haouaria

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Tel: (+216) 24381349

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