C’est à la faveur d’une journée de découverte de la figue de Djebba qu’un concours de pâtisserie valorisant ce produit a été organisé courant août 2017, en pleine période de récolte qui s’étend jusqu’à la fin du mois de Septembre. Plus d’une douzaine de femmes y ont participé et un jury composé de Chefs cuisiniers, de représentant de bailleurs de fond et de journaliste ont pu découvrir pas moins d’une trentaine de recettes. Par Amel DJAIT
Figuier sur roche
Avant le concours, la transformation et le plaisir des sens, il faut aller à la source, le fruit. La figue est le produit emblématique de Djebba . Elle est le cœur de son économie, art de vivre, identité…
Le Montazah de Djebba
Djebba est un petit village de 6000 habitants posé sur un flanc de montagne à quelques 700 m. Ici, tout tourne autour de l’agriculture et de la figue. En Tunisie, le seul fruit qui bénéficie à ce jour, d’une Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) est le « Bouholli », la rolls royce des figues. La variété ne pousse que dans cette localité et son nom fait référence au « Houli », vêtement traditionnel des femmes rurales de la même couleur.
Le Bouholli est un AOC qui a été octroyé par arrêté du Ministère de l’Agriculture Tunisienne. Celui-ci certifie que le « produit dont les étapes de fabrication (production et transformation) sont réalisées dans une même zone géographique et selon un savoir-faire reconnu. C’est la combinaison d’un milieu physique et biologique avec une communauté humaine traditionnelle qui fonde la spécificité d’un produit AOC. Les appellations d’origines ne sont ni des marques ni des modèles déposés, mais des certifications officielles de provenance et de savoir-faire délivrées par un organisme dépendant d’un ministère et sanctionnée par un service de répression des fraudes.L’objectif de ces signes de qualité est de les rendre facilement reconnaissables ».
Aujourd’hui les agriculteurs de Djebba ont créé une (SMSA) Société Mutuelle de Services Agricoles « Djebba Fruits ». 67 agriculteurs vendent ainsi leurs produits 80% plus chères que les figues standards. Grâce à leur récent groupement (2014), ils bénéficient de l’AOC et de soutien de la coopération internationale, programme (PAMPAT) avec notamment l’aide à la création d’une unité de conditionnement, un camion frigorifique….
Si le « Bouholli « est la star incontestée de la figue Tunisienne, il n’empêche qu’il y’a au moins plus de 27 variétés reconnus dont le « Zidi », le « Goutti », le « Garai », le « Boukhboza », le » Soltani Ahmer », le « Zergui », le « Soltani Abiadh », le « Fawari », le « Zergui »…
Le dynamisme créé autour de la figue est aussi à la source d’un concours annuel impliquant les femmes agricultrices du village. Valoriser la figue de Djebba pousse les amatrices ainsi à convertir des recettes traditionnelles à la figue. C’est ainsi qu’elles retravaillent la « samasa » ou le « makroudh », plus connu aux fruits secs pour le premier et aux dattes pour le second, à la figue séchée, plus communément appelé « chriha ». C’est d’ailleurs ces deux premiers recettes qui ont gagné les deux premiers prix du concours. Le reste des propositions a tenté tant bien que mal de conjuguer la figue aux crèmes, crêpes, boisson, cakes, gâteau, entremets, friandise, tarte,….
Fraîches, séché, en poudre ou en copeaux, le fruit répond aux besoins d’une cuisine inventive et bénéfique à la santé vu les vertus de la figue: un pouvoir antioxydant, un taux faible en sucre, riche en vitamines et en fibres et un gout délicatement sucré. Sur place, les femmes se transmettent les recettes ancestrales et produisent une confiture mais aussi des figues séchées, des chocolats aux figues….
Les produits sont commercialisés par le SMSA « Djebba fruits » et par le Groupement de Développement Agricoles « Kounouz Djebba ». Le potentiel du produit est énorme estime le chef de cuisine Riadh qui souhaite faire travailler ses élèves de l’Ecole hôtelière de Kerkouane sur le produit.
Les participantes au concours
Créations des participantes aux concours
Confiture “Kounouz Djebba”
Ceci dit, les femmes ont encore plus d’ambitions. Elles veulent faire de leur village un centre d’écotourisme et se structurent pour recevoir des visiteurs le temps d’une journée : Wassila Djebbi est enthousiaste malgré des difficultés monstrueuses pour vendre leurs confitures : « Notre région est très belle, nous aimons recevoir et nous disposons d’un savoir faire faire culinaire qui vaut le détour. Ici, chaque maison peut être une table d’hôtes ! » La région de Djebba est déjà connue pour être une des randonnées les plus incontournables de Tunisie.
D’ailleurs, c’est aussi et surtout cela la motivation de plusieurs agences de voyages invitées à découvrir la région. Rachida Ben kilani est consultante chez Wided Travel. Elle organise des sorties pour des clients fidèles et se déclare enthousiaste pour une excursion à Djebba : « La région est magnifique, un peu de marche, une bon déjeuner et une animation musicale dans le Montazah de Djebba fera largement l’affaire. Les tunisiens sont de bons clients. Ils veulent découvrir leur pays et s’amuser. Nous avons remplis deux véhicules avec 66 personnes pour une journée à Haouria. Notre programme Tabaraka était complet aussi. Nos prix sont raisonnables et notre clientèle en demande. Je suis à Djebba pour finaliser mon programme et la région est déjà dans le pipe »
Repas sur la plateau du Montazah de Djebba
En Tunisie le tourisme local se structure et s’impose de plus en plus comme une composante essentielle et structurante à l’activité. Les produits de terroir et les labels de qualité font aussi du chemin. En novembre 2017, le premier concours national des produits de terroir sera organisé. La figue Bouhoulli de Djebba et les confitures seront assurément de la partie.
Le concours est organisé sous le leadership de l’APIA en collaboration avec le Ministère de l’Agriculture et des Ressources Hydrauliques et de la Pêche, le ministère de l’Industrie et du Commerce et la Cité des sciences. L’ensemble du projet évolue dans le cadre du Projet d’Accès aux Marchés des Produits Agroalimentaires et de terroir ( PAMPAT) soutenu par le Secrétariat d’Etat à l’Economie Suisse (SECO) et l’Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel ( ONUDI)