Lorsque l’on demande aux opérateurs touristiques comment se porte le secteur au vu de l’actualité, ils répondent qu’ils aspiraient à une saison plus ou moins capable de sauver les meubles.

Or, la réalité est tout autre.  Avec l’assassinat du député Mohamed Brahmi, les explosions de bombes artisanales, le massacre des soldats au mont « Chaâmbi »,  les actes de terrorisme impactent sur  le tourisme: Le secteur est à l’agonie

Mohmade Ali Toumi Président de la Fédération Tunisienne des Agences de Voyages ( FTAV) rassure autant que faire se peut. « Il n’y a presque pas eu d’annulations, à part quelques groupes dans le cadre de tourisme d’affaires. On a également quelques soucis avec les Algériens et les Italiens. Mais ce qui est alarmant, c’est la suspension totale de réservations pour le reste de la saison. Zéro ventes, plus du tout de réservations! Ceci est un indice très négatif!”.

Bien que le gouvernement assure qu’il n’y a pas d’impact direct sur les réservations du mois d’août et qu’il soit encore trop tôt pour évaluer les répercussions, les opérateurs du secteur rient jaune de cette saison qui s’annonçait déjà pas très bonne à cause de ramadhan, de l’image négative du pays, de la crise en Europe, des indications d’éviter de quitter les hôtels, d’où l’abstention de choisir la destination.

Les commerçants sont d’autant plus inquiets car les assassins ne se contentent plus de liquidations ciblées, ils passent au meurtre en masse. Ils s’attaquent par exemple à La Goulette pour sa symbolique religieuse, mais aussi et surtout parce que c’est le cœur palpitant du tourisme de croisière. Autant dire une autre menace qui vaut son impact sur l’économie tunisienne qui plonge au plus bas avec une Bourse qui s’effondre et une chute sans précédent du dinar.

Mohamed est commerçant aussi à Hammamet. D’inquiet, il passe à paniqué et désespéré. Il avoue: «On attendait les Algériens. On espérait qu’ils vont venir mais avec ce nouvel assassinat et les récents évènements , cela est bien compromis ! Comment allons-nous nous en sortir? Comment allons-nous nourrir nos enfants et attendre jusqu’à la saison prochaine si toutefois il y en a…».

Saisonnier, le tourisme tunisien fait le plus gros de son chiffre en haute saison, à savoir juillet et août. L’arrière-saison fait souvent la différence dans les réserves des entreprises et les poches du près d’un million et demi de gens qui vivent du tourisme. Mais elle aussi semble compromise au vu du contexte politique du pays. Entre la rentrée scolaire qui s’annonce chaude et la date du 23 octobre qui sera probablement très chahutée, la saison de la thalassothérapie, du tourisme golfique et culturel soulève déjà de grandes inquiétudes

Thomas est agent immobilier. Sa vision du quotidien va dans le même sens. Il n’en revient pas de cette saison blanche: «Je n’ai fait que quelques locations qui ne payent ni mes charges ni peuvent sauver mon entreprise. Comment vont faire les populations pour qui les locations saisonnières sont vitales pour clore leurs budgets de l’année…».

Farida se pose quant à elle des questions sur l’absence des Tunisiens résidents à l’étranger. Où sont-ils? Pourquoi ne viennent-ils pas?

Le tourisme paye de façon générale un lourd tribut à la phase de transition démocratique.Certains pensent que Hammamet en paye un plus lourd encore. Revanche des temps où la ville était la chouchoute de l’ancien régime ou conséquences de certaines manifestations spectaculaires comme celle de prédicateurs haineux, de manifestations de radicaux islamistes?

En attendant d’y voir plus clair, les opérateurs touristiques ont finis un mois de juillet morose. Il est, selon Mouna Ben Halima, hôtelière à Hammamet, «le pire depuis plus de 30 ans». Sousse et Mahdia se portent légèrement mieux alors que Djerba et Zarzis plongent et certains affichent jusqu’à -50% par rapport à l’année écoulée.

Le tourisme tunisien n’a pas fini de toucher le fond.

Maintenant serait-il décent de se poser des questions sur son état alors qu’une grande partie du pays se soulève contre une transition démocratique qui prend l’eau?

Amel Djait

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