Anthropologue de formation mais avant tout photographe, Augustin Le Gall arpente la Tunisie depuis 2008. A travers un travail photographique d’une grande sensibilité, il nous livre l’âme d’un peuple dans toute sa diversité. Rencontre avec Mille et une Tunisie.

Mille et une Tunisie : Depuis quand travaillez-vous en Tunisie ?
Augustin Le Gall : Depuis 2008 date à laquelle je suis venue pour la première fois ici afin de faire des recherches sur le stambali, cette musique rituelle qui puise ses racines dans l’Afrique sub-saharienne.
Je m’intéresse aux rites de possession depuis de nombreuses années. J’ai tout d’abord travaillé au Maroc sur les gnawas avec un ami photographe. Nous avons développé un projet photographique autour de ce patrimoine immatériel qui a abouti à la publication du catalogue d’exposition « Mémoire d’Essaouira ». J’ai eu envie d’aller plus loin dans mes recherches sur ces rituels. A force de travail et de persévérance, je suis devenu en 2008 le photographe du festival d’Essaouira consacré aux gnawas. J’ai aussi participé au montage de l’exposition « Gnawas entre tradition et création ».
De file en aiguille, sachant que je m’intéresais aux musiques rituelles, on m’a indiqué qu’en Tunisie il existait le stambali. C’est ainsi que j’ai débarqué ici avec un nom Riadh Ezzaouche. J’ai finalement rencontré ce dernier qui est arrifa (maître de cérémonie) de la dernière zaouia stambali du pays, le Dar Sidi Lasmar. Une profonde amitié est alors né entre nous.

Qu’est ce qui vous a amené à la photographie ?
Une envie, une passion, parallèlement à mes études d’anthropologie à Aix-en-Provence. Pour moi, la photo est avant tout une poétique, mon rapport au monde. Je ne me considère pas comme un photographe ethnographe même si, bien évidemment, mon cursus universitaire influence mon regard. La photo a été pour moi un médium pour entrer dans le domaine du rituel gnawa et stambali. Je me questionne beaucoup sur la pratique du photographe. Je déteste les cases et me considère simplement comme photographe-documentaire. Actuellement, j’ai un travail photographique personnel que j’expose et en parallèle de répond aussi à des commandes de photojournalisme pour des revues internationales comme Libération, Jeune Afrique, Le Monde, Marianne…

Parlez-nous de votre rapport à la Tunisie en tant que photographe ?

J’ai fait un gros travail sur le stambali en Tunisie puis la révolution du 14 janvier 2011 est arrivée et j’ai été littéralement happé par cet événement. J’ai vécu des moments très forts humainement les six premiers mois de 2011 et enrichissants professionnellement. J’ai l’impression à présent d’être fortement lié à la Tunisie. J’ai alors entamé tout un travail sur la société tunisienne en différents actes. L’exposition « Sous le Jasmin » qui se tient actuellement à la maison de la Culture Ibn Rachiq » n’est qu’un des actes de ce travail que j’ai nommé « Portait d’une Révolution ». Chaque série photos correspond à un acte, il y en a 7 pour l’instant : Acte 1 : le Peuple veut, l’Acte 2 : Aux urnes citoyens, l’Acte 3 : Sous le Jasmin, l’Acte 4 :Les artistes tunisiens, l’Acte 5 : l’Assemblée constituante, l’Acte 6 : Les familles des martyrs de la révolution et l’acte 7 : les Salafistes.

Quels sont vos projets à venir ?
J’ai un projet photographique et documentaire à propos de la route des esclaves. Il s’agirait de remonter depuis Tunis la route des esclaves, de traverser l’Algérie, le Maroc, le Niger, le Mali, la Mauritanie pour remonter aux sources du stambali. Avec peut-être au final une œuvre sous forme de théâtre documentaire avec vidéo, photos… Je travaille aussi depuis un certain temps à un projet intitulé « Ouled Bilal », série de portraits autour des personnages théâtralisés que l’on rencontre dans le stambali.
Ce ne sont pas les envies qui manquent !

Vernissage de « Sous le Jasmin », exposition d’Augustin Le Gall -le mercredi 8 mai à 18h30 Maison de la Culture Ibn Rachiq – Tunis
Avenue de Paris – 1000 Tunis
Pour en savoir plus : page Facebook (facebook.com/expositionsouslejasmin) et www.augustinlegall.com

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