Une matériauthèque particulière
« Je n’avais que deux murs, une structure en fer avec six piliers, trois traverses et une couverture en tôle ondulée »-C’est ainsi Mouna Choyakh résume le point de départ de son projet singulier. Par Edia Lesage
Qui est Mouna Choyakh ?
Mouna Choyakh est une architecte d’intérieur, jeune et dynamique. Elle exerce ce métier depuis treize ans après ses études à l’école des beaux arts (ISBAT) où elle avait eu notamment comme enseignant Farouk Tritar, de 2002 à 2004.
Depuis sa création par Safia Farhat, l’ISBAT a été un établissement pionnier en matière de rapprochement des Arts et des Métiers . Dans cet esprit, Farouk Tritar avait le projet de créer une matériauthèque à l’ISBAT pour que les futurs professionnels puissent voir et toucher les différents matériaux qu’ils auraient à mettre en œuvre. Cet enseignant, totalement dévoué à ses étudiants a marqué plusieurs promotions de l’ISBAT section Architecture d’Intérieur. Par ses initiatives liées à son sujet de prédilection, la connaissance des matières et des matériaux. (Visites de projets récemment achevés, foire, entreprises de façonnage…).Plusieurs années après la disparition de Farouk Tritar, ( 2009) Mouna a voulu concrétiser ce projet .
Après ses études, Mouna Choyakh a été sollicitée pour enseigner. C’est sans compter sur la ténacité de cette jeune étudiante qui avait déjà effectué deux stages en architecture d’intérieur avant de rentrer à l’Ecole. A l’issue de son diplôme, elle travaille notamment à l’agencement de boutiques (de la conception à la réalisation), et d’une usine. Puis elle crée sa propre agence en 2006 qui comprend une bibliothèque de matériaux, tant pour elle que pour ses clients. Lorsqu’elle reçoit des stagiaires de l’Ecole, elle a la confirmation que la connaissance des matériaux est plus que lacunaire chez les étudiants.
Après un bref passage d’enseignante à l’ISBAT, en 2010, elle décide d’y créer la matériauthèque chère à Farouk Tritar, afin de remédier aux lacunes de l’enseignement, trop théorique.
Le directeur donne son accord à condition qu’elle résolve la question du financement et propose un local au troisième étage, inaccessible aux handicapés puis lui laisse « carte blanche » pour trouver le local idoine. C’est ainsi que Mouna trouvera un appentis qui servait au stockage du matériel réformé de l’ISBAT. Elle imaginera le projet et trouvera les sponsors pour la toiture intérieure et extérieure, les façades et les châssis vitrés, les revêtements de sols, l’éclairage et l’électricité, la climatisation, la peinture, le mobilier d’exposition, et les matériaux et catalogues à exposer. (Pierre, bois, verre, métal, aluminium, vasques). Elle définira aussi le système de gestion qui sera assuré par des étudiantes de deuxième année qui, au départ chapeautées par Mouna, se succéderont chaque année universitaire. La rotation devant se faire de manière autonome, à terme.
La matériauthèque Farouk Tritar :
Cette matériauthèque qui tranche par son aspect propre et lisse avec les bâtiments un peu fatigués de l’ISBAT a été inaugurée le 12 mai 2017 en présence du Directeur de l’ISBAT, de responsables du rectorat, de conseillers du ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, d’anciens et nouveaux enseignants, des anciens élèves, des élèves, des amis, de la famille de Farouk Tritar sans oublier ‘Am Hassen, le patron du petit restaurant face à l’école des beaux arts où Farouk Tritar déjeunait.
Ce projet dont l’ inauguration gaie et conviviale, était à l’image de l’enseignant décédé ,est un projet pionnier pour le partenariat public/privé dont on parle tant (P.P.P).Ceci a été relevé par le Conseiller du Ministre Driss Sayah , lors de son allocution ainsi que par une distinction décernée à la promotrice du projet ,par le Ministre, Slim Khalbous, qui a écrit notamment « C’est avec un intérêt admiratif que j’ai suivi cette initiative inspirée, généreuse et hautement symbolique que vous avez eue d’offrir une matériauthèque à votre Institut en hommage à la mémoire d’un enseignant qui vous a marqué, le professeur Farouk Tritar(…) Votre geste résume et incarne l’esprit de la plupart des projets pour lesquels nous œuvrons dans le cadre de la réforme universitaire ».