Une salle qui en avait besoin. Celle-ci ne s’est pas fait prier pour exprimer craintes et désarrois et reprocher une timide volonté de sortir de l’immobilisme dans lequel se traine le tourisme tunisien. La question du moment est bien entendu celle de l’Open Sky qui ne cesse de revenir sur le tapis. Les uns pensant que c’est le sésame qui résoudrait une grande partie des soucis du secteur. Les autres estimant que cela reviendrait à remplacer les charters déjà présents sur le marché sans grand effet par rapport à la situation actuelle. Pour passer à l’Open Sky, c’est toute la destination qu’il faudrait mettre à niveau. Sauf que si l’on attend indéfiniment, on risque fort de rester dans cet immobilisme qui fait perdre à la destination un temps précieux et beaucoup d’argent.

Le second moment fort du meeting fut aussi celui de l’endettement. Ettakatol prône le cas par cas mais n’hésite pas à trancher dans le vif en affirmant ce que beaucoup murmurent. Le parc hôtelier tunisien vieillit et il faut pour redresser la situation arrêter l’hémorragie. « Il y a des hôtels que l’on ne peut plus sauver. Ils ont renoncé à se sauver eux même. Que faire ? Continuer à les laisser tirer le secteur vers le bas », répond Mehdi Allani à ceux qui réfutent ce genre de position.

Au terme de deux heures de conversation animée, Khellil Zaouiya a tiré les conclusions et a affirmé avoir saisi que rétablir le rôle d’un ministère du Tourisme renforcé dans ces attributions tout en améliorant ses rapports avec les autres administrations était une des clefs de voute du succès de la réforme du tourisme tunisien. Le secteur ayant besoin d’innovations, de régulations et bien entendu d’incitations.

Ettakatol a profité de cette occasion pour établir le contact avec les professionnels et proposer son programme 100 jours pour agir. Une présentation des mesures à court terme qui se résume en quatre actions immédiates :

•  Ouverture de l’espace aérien : Il est évident que cette restriction est en place pour protéger la compagnie nationale et précédemment celle de Belhassen Trabelsi. Cette  restriction pénalise fortement les établissements hôteliers ainsi que tous les secteurs d’activité touristique. L’ouverture du ciel augmentera le nombre de visiteurs vers la Tunisie, nous pourrons nous positionner comme destination court séjour (week-end & breaks). Cette nouvelle clientèle est intéressante car elle est habituée à voyager en dehors de la haute saison et cherche à découvrir davantage les richesses de  notre patrimoine. La clientèle d’affaires recherche aussi les vols low cost. Il est indispensable de compléter l’ouverture de l’espace aérien par une baisse des frais aéroportuaires.

•  Assainissement du parc hôtelier : un certain nombre (estimé entre 40 et 60) d’unité hôtelière se trouve dans l’incapacité d’honorer leurs engagements financiers. Ces unités défaillantes tirent le produit vers le bas. Venir en aide à ces hôtels serait une grosse erreur stratégique (et inutile). En effet, cela ne fera que mettre sous perfusion (et gaspiller de l’argent) un malade incurable. Nous préconisons donc de laisser les organismes financiers recourir aux moyens légaux afin qu’une décision de justice leur permette de vendre leurs actifs aux moyens d’appel d’offre. Les emplois afférents seront pris en compte selon le cadre légal de la convention collective.

•  Amélioration immédiate du contrôle de qualité : Durant de nombreuses années, les autorités ont fait part de légèreté en matière de contrôle de qualité des prestataires touristiques. Il est primordial d’y remédier. Tout d’abord, il est indispensable de proposer une formation aux inspecteurs du tourisme afin de leur permettre d’être à jour. Il est nécessaire d’assurer des contrôles de qualité (hygiène, prestations, environnement…) et de lutter contre la contrefaction.

•    Préparation de la nouvelle campagne de communication : Il est indispensable de lancer une nouvelle campagne de communication dédiée aux marchés émetteurs. Cette campagne aura comme 1er objectif de soutenir la vente pour la saison 2012, elle sera également une base marketing pour l’avenir. Il est urgent de changer l’image de la destination mono-produit en destination multi-produits.

En ce qui concerne la stratégie à moyen  et long terme, elle s’articule comme suit :

Les attentes  du consommateur ont évolués (et évoluent encore) et le produit stagne depuis près de 20 ans. L’écart est tellement important qu’il nous est impératif de révolutionner notre produit. Cette révolution s’articulera autour de deux évolutions centrales:

•  La régionalisation du produit : Cette régionalisation consiste à abandonner le produit destination Tunisie vers 5 ou 6 produits destinations régionales. Nous ne pouvons pas vendre toute la Tunisie sous une seule marque, c’est comme si un hôtel voulait séduire tous les types de clientèle. Nous définirons pour chaque région les produits et service clés à développer et mettre en avant. Parmi ces produits : Le patrimoine naturel (plage, foret, désert, campagne, mer, thermes, parc…), le patrimoine culturel (site archéologique, mosquée et lieu de culte, musée…), gastronomie régionale, festivals et manifestations en région, etc. Il est également important d’avoir une destination «tendance et haut de gamme» à l’image de Marrakech. En complément de cela, il est nécessaire qu’il y ait une indépendance et une décentralisation décisionnelle. Il y aura donc une direction Tourisme pour chaque région.

•  Le développement de nouvelles niches : Il s’agit de créer ex-nihilo ou de développer de nouvelles niches (tourisme médicalisé pour 3ème âge, tourisme d’affaires, tourisme sportif, maison d’hôtes,  aventure, circuits, tourisme nature, culturel, loisirs, etc.)

Amel Djait

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