Cet été, au cours d’un événement intitulé « Aesthète Events », qui réunissait des talents multiples et variés, le public a découvert une photographe, qui raconte la Tunisie à sa manière, sensible, précise et délicate. Beaucoup se sont arrêtés devant ses photographies, reproduites aussi sur des tissus et des coussins. Cyrine Ben Ghachem a d’abord été architecte d’intérieur. Elle a enchaîné ensuite avec un master en histoire de l’art ainsi qu’un autre master en patrimoine et muséologie à la faculté de la Manouba. Elle s’est spécialisée sur le sud -est tunisien, en particulier sur les régions, villes et villages de Tataouine, Chenini, Douiret et Guermessa.
C’est par plaisir et par obligation qu’elle est devenue photographe. Par plaisir, pour pouvoir partager le sud tunisien avec ses amis qui ne le connaissait pas, par obligation pour documenter son sujet d’étude. Elle est devenue ainsi la « photographe du laboratoire du patrimoine de la Manouba». Et puis, la photographie est devenue une passion : elle sillonne la Tunisie et prends des photographies du Kef, de Testour, de Djerba …
Les tanneries de Chouara ou l’art de “se prendre un choc culturel”
Sa première exposition de photographies, en 2015, à la Maison de Tunisie s’intitulait « Le Sacré en Tunisie », en partant de l’Hermaïon jusqu’à nos jours. Elle expose ensuite à L’A.U.F (Agence Universitaire de la francophonie) au Maroc où elle obtient le premier prix. Son sujet portait sur les femmes de Sejnane. Elle a une journée « off » et part à Fès pour voir la capitale culturelle du pays. C’est là qu’elle découvre les tanneries de Chouara et « se prend un choc culturel » impressionnant. Elle se promet de revenir et de faire une exposition sur les tanneurs de Fès. C’est ce qu’elle a fait en octobre 2019.
En 2019, elle vit une expérience unique. Les tanneurs l’orientant même vers la lumière ou les endroits qu’ils jugeaient bons d’être vus. Elle est rentrée dans « l’Histoire ».
Cyrine Ben Ghachem – Des couleurs et des matières magnifiques…
«On oublie que ce sont des peaux », dit-elle, tellement les couleurs et les matières sont magnifiques. C’est ce que l’on ressent à la lumière de cette exposition, documentaire tout en étant poétique, confinant parfois à l’abstraction. Cyrine Ben Ghachem connaît bien son sujet et se fait « adopter » par la confrérie des tanneurs. Elle descend parmi trois-cent –soixante-cinq hommes. Personne, d’habitude, ne va « en bas », parmi les « vases »: l’odeur est trop forte. Elle en ressort avec une collection de photographies impressionnante : 265 photographies en quatre jours.
Au-delà de la beauté plastique et colorée de la tannerie, c’est un savoir-faire ancestral qui n’a pas changé depuis sa création, au XIème siècle que Cyrine Ben Ghachem documente, toujours avec son regard particulier. C’est un métier qui se transmet de père en fils. En Tunisie, il ne subsiste de ce métier que le souk qui en porte le nom, souk El Dabbaghine .
Cette exposition a été présentée au public à l’hôtel de ville de Sidi Bou Saïd au mois de novembre 2019, l’espace de trois jours. L’ambassadeur et la conseillère culturelle du Maroc sont venus. Ils l’ont félicité pour son travail qui avait pour objet de montrer de près ce que l’on voyait jusque là comme un tableau abstrait depuis les terrasses.
Vous pourrez voir les photographies aux événement « Aesthète Events » à l’hôtel Résidence de Gammarth, les 13, 14 et 15 décembre 2019 de 10 heures à 21 heures, puis au Mövenpick Hôtel du Lac la semaine suivante.
Les photographies sont superbes et l’on sent au-delà de l’historienne, un talent qui mérite d’être découvert. Cyrine Ben Ghachem a des projets : repartir sur les traces de la médina de Tunis puis plus tard, offrir au public des regards croisés sur la Syrie et ses pays limitrophes.
Edia Lesage
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