Le fait que ce secteur ait longtemps été considéré comme un secteur subalterne et marginalisé par une destination qui a plus parié sur l’hôtellerie que sur le tourisme, a fini par exploser au grand jour.

Depuis quelques semaines, ce sont plusieurs dizaines d’agences de voyages qui sont contraintes de cesser leurs activités ou en sont fortement menacées. Elles font l’objet de saisie de véhicule, de difficultés financières, d’une chute libre de leurs activités… Dans les tout prochains jours et si des solutions urgentes ne sont pas trouvées, c’est le dépôt de bilan pour elles. Ces fermetures entraîneront un chômage supplémentaire dont n’a vraiment pas besoin le pays. Elles pénaliseront également le tourisme qui a réellement besoin de toutes les compétences pour se remettre sur pieds, relever les nombreux défis qui l’attendent, travailler et innover afin de sortir du marasme dans lequel il se trouve.

« Si l’autorité de tutelle n’intervient pas d’ici 15 jours pour régler les problèmes du secteur qui vit une situation catastrophique, la Fédération Tunisienne des Agences de Voyages (FTAV) recourra à de nouvelles formes de protestations», a déclaré M. Ali Ettoumi, président de la FTAV.

Autrement dit c’est l’échec d’un bureau récemment élu et qui se démène pour faire entendre sa voix. Cela augure aussi et surtout de la colère qui gronde. La ras le bol de plus de 700 agences de voyages opérant dans différents segments tels que la billetterie, les circuits, le Mice… Autant de segments lourdement touchés par la crise touristique dans un contexte marqué par une crise économique en Europe. Les multiples perturbations que vit le pays ne vont pas pour le moment dans le sens de l’amélioration et plongent même les opérateurs touristiques dans une absence totale de visibilité pour 2012.

Dans un communiqué, la FTAV expose ses problèmes et propose des solutions. Elle demande à être écoutée d’urgence :  

1)  Problème de la «caution ONTT»
Il s’agit de la principale inquiétude des professionnels aujourd’hui dans la mesure où elle concerne la totalité des agences de voyages en Tunisie. L’Office National du Tourisme Tunisien a en effet décrété la date du 31 janvier 2012 comme dernier délai pour les agences de voyages tunisiennes de s’acquitter d’une caution financière d’un montant de 50.000 dinars pour les agences de catégorie A et 25.000 dinars pour les agences de catégorie B. A défaut, les agences risquent une fermeture administrative. La FTAV en appelle par conséquent à ce que l’ONTT leur fasse bénéficier d’un délai supplémentaire de deux mois afin de trouver une solution légale et durable à la problématique.

2)  Report des échéances sociales et fiscales
Au vu des difficultés financières qu’elles traversent, les agences de voyages demandent officiellement aux autorités concernées -non pas une exonération- mais un report des échéances de paiement de leurs cotisations à la CNSS ainsi qu’un report de paiement des échéances fiscales (TVA et tiers provisionnels).

3)   Omra et Haj
Au vu du statu quo qui demeure dans l’organisation des voyages aux Lieux Saints et de la main mise de la SNR (connue sous le nom de Montazah Gammarth), les agences de voyages en appellent à la libéralisation de cette activité tout en maintenant l’existence de la SNR. L’objectif de la libéralisation étant d’assurer des conditions de voyages et de séjours dignes pour nos pèlerins.

4)  Transport terrestre
Les agences de voyages spécialisées dans le transport touristique terrestre ont été les plus durement touchées par la chute de l’activité touristique. Nombre d’entre-elles ne sont, par conséquent, plus en mesure d’honorer leurs échéances financières à l’égard des sociétés de Leasing (dont certaines ont déjà mis en place des mesures de rétorsion en confisquant des véhicules). La FTAV en appelle par conséquent les compagnies de Leasing à faire preuve de plus de souplesse vis-à-vis des agences jusqu’à l’été prochain, date de la reprise -ne serait-ce que partielle- de l’activité touristique.

5)  Commission «IATA»
Durement frappées par les cautions financières exorbitantes exigées par l’IATA (l’Association internationale du transport aérien) depuis le mois d’août 2011, les agences de voyages opérant dans la billetterie aérienne vivent sous la crainte de voir leur activité stoppée d’un jour à l’autre. Déjà, l’on compte actuellement une quinzaine d’agences qui ne peuvent plus vendre de billets d’avion, l’IATA leur ayant fermé l’accès à la base de données mondiales du transport aérien (BSP) pour défaut de caution. La FTAV attend à ce sujet la prise de position officielle du ministère du Transport.

6)  Voyages à l’étranger
A l’heure où le peuple tunisien a obtenu sa liberté et sa dignité grâce à la révolution et à ceux dont le sang a coulé, la Banque Centrale de Tunisie a surpris la communauté des agences de voyages en limitant l’enveloppe destinée aux voyages à l’étranger à 10 MD. Or, depuis 2007, il était permis aux Tunisiens de voyager à l’étranger en toute dignité en payant leurs séjours en dinars tunisiens avant de partir. La FTAV en appelle par conséquent au ministère des Finances de tripler le budget alloué à l’outgoing pour répondre à la demande du marché, en rappelant que ce budget avait atteint 23 MD en 2010.

Les agences de voyages, conscientes de la nécessité pour le tissu économique tunisien de retrouver son rythme de croisière, se disent pleinement disposées à jouer leur rôle dans la dynamique touristique tunisienne pour peu que les contraintes et les lourdeurs administratives soient levées. La profession est cependant très inquiète des pressions administratives qui pèsent sur elle et espère la mise en place de solutions rapides et efficaces. Elle ose par contre espérer que ses appels soient entendus par les responsables de tutelle pour que chacun se remette au travail. Les agents de voyages insistent cependant sur le fait que le temps leur est compté et que leur patience n’est malheureusement pas sans limite.

Communiqué et Amel Djait

{jcomments on}