La Galite

Généralement, les cartes routières omettent de signaler la Galite au large des côtes nord-ouest de la Tunisie, à une soixantaine de kilomètres au nord-est de la ville de Tabarka. C’est curieux. C’est surtout triste, mais c’est comme ça !

Il est vrai que ce territoire est pratiquement inhabité depuis un demi-siècle. Il est tout aussi vrai que pendant tout ce temps-là,  il était considéré comme périmètre militaire. Est-ce une raison pour amputer le pays d’une partie si infime soit-elle de son intégrité territoriale, fût-ce au seul niveau de la cartographie ?
Bref, au même titre que l’archipel des Kerkennah, de Djerba ou de l’une ou l’autre de la soixantaine d’îles et d’îlots qui s’égrènent le long des côtes tunisiennes sur leurs façades nord et est, les îles de la Galite constituent des avant-postes maritimes du territoire tunisien. Depuis peu il est vrai, elles polarisent de plus en plus l’attention des visiteurs en attendant celle des promoteurs d’un tourisme écologique, culturel et de loisirs.

Nous parlons d’îles, car c’est à un petit archipel que nous avons affaire. En fait, c’est plus un bout d’enchantement flottant en Méditerranée qu’il s’agit Il est formé de six îles et îlots et comprend la Galite à proprement parler, le Galiton, la Fauvelle et les îlots Cani. Le tout s’étendant sur environ 800 hectares et s’étirant sur une ligne longue de près d’une dizaine de kilomètres.

L’île principale, la Galite, mesure 5,3 km de long sur 2 km de large pour une altitude maximale en son centre de 391 m. Elle est -et c’est la seule- dotée d’un débarcadère (les quais d’un ancien port de pêche) où la Garde Nationale Maritime dispose d’un poste-frontière. Il s’agit de la Galathea des Anciens et qui fût, dans l’Antiquité, un point d’escale phénicien, punique puis romain. Au pied de la montagne de la Garde (361 m de hauteur, à l’est de l’île), subsistent encore des sépultures puniques, des vestiges de constructions romaines, des carrières abandonnées et des grottes qui témoignent de cette occupation passée.

Pour n’avoir plus été habitée de manière permanente des siècles durant par la suite, la Galite n’en était pas moins utilisée comme point de relâche pour les pêcheurs européens de corail qui opéraient sur les côtes nord et l’est algérien dès le XVI° siècle, d’où la présence en l’île de certaines installations qui pourraient remonter à cette époque-là.

C’est avec le protectorat français qu’une petite colonie d’Européens occupe à nouveau l’île de façon permanente. En 1906, on dénombrait 174 habitants dont 67 Français et 107 Italiens. A la fin des années 30, on signalait la présence sur l’île de quelques bergers tunisiens. Le leader Habib Bourguiba y sera exilé dans les années cinquante par les autorités coloniales qui voulaient le couper de ses partisans.

Durant toute la première moitié du XX° siècle, l’économie locale reposait essentiellement sur la pêche, plus particulièrement celle de la langouste, dont de grandes quantités étaient exportées sur le marché européen. Les cultures vivrières et la vigne assuraient tant bien que mal l’autosuffisance en produits alimentaires de base que complétait un maigre élevage de chèvres sur une terre plutôt aride et dans des conditions climatiques aléatoires. La nationalisation des terres agricoles détenues en Tunisie par des étrangers, début des années 60, a fini par convaincre les derniers occupants de l’île après l’indépendance du pays en 1956 de quitter les lieux pour aller s’installer en Europe.

Depuis cette époque, l’archipel a littéralement été tenu en marge de la vie nationale, sauf en matière de défense. L’Armée y entretenant une garnison chargée d’y perpétuer la souveraineté nationale. Désertée par les civils qui entretenaient une certaine forme de vie économique et sociale, l’île est petit à petit retournée à son état naturel. Les diverses installations civiles se sont progressivement désintégrées et les parcelles cultivées retournées en jachère. Durant cette période de quasi-abandon, des dommages considérables ont été infligés à ce milieu réputé fragile. Des déprédations y ont été commises par les bergers qui étaient chargés par un important éleveur de moutons d’y faire pâturer son bétail : sépultures violées et locaux endommagés, sans compter les dégâts causés au couvert végétal par les troupeaux.

Ces dernières années, l’Etat a repris les choses en main. La garnison de l’Armée nationale installée à la Galite a été chargée de mener une action de restauration des terres en vue de leur réhabilitation à usage agricole au profit d’une communauté d’agriculteurs qui y seront installés sitôt l’action parvenue à son terme. Le repeuplement de l’île devrait préluder à la matérialisation d’un rêve tant de fois caressé : l’ouverture de l’archipel au tourisme. Et il a des arguments pour plaider en faveur de ce choix : beauté sauvage des paysages, un environnement sauvegardé, un patrimoine historique et archéologique, richesses sous marines, etc.

Des excursions d’une journée sont aujourd’hui organisées en direction de l’île principale durant la belle saison à partir de Tabarka par des opérateurs patentés. Les visites privées sont soumises à l’autorisation des instances compétentes (gouvernorat, Garde Nationale) de Bizerte dont l’archipel relève administrativement. Il faut s’y prendre assez longtemps à l’avance (se renseigner sur les délais). Tahar Ayachi


Guide pratique
:

Différents forfaits sont disponibles auprès des opérateurs sur place et via internet. Des excursions allant de 1 à 3 jours offrent une panoplie d’options : pêche, baptême, balades en mer….
Dans la région, les forfaits à la journée se situent entre 30 et 50D par personne. Des excursionnistes proposent des sorties en mer avec un programme mer, « snorkelling » et incluent des repas souvent composés des produits de la mer.

Les clubs de plongée offrent des baptêmes. Ils connaissent les coins et recoins des fonds marins, des épaves, et des lieux à ne pas rater. Sachez seulement que le site de la Galite est protégé. Sur un rayon de 3,5 km, il est interdit de chasser. On s’évertue en effet de protéger le foyer des phoques moines. Une variété menacée

Ceux qui aiment la pêche seront ravis. A la palangrotte ou à la traîne, ils peuvent exercer leurs talents de pêcheurs. A leurs palmarès, ils pourront ajouter le thon, la dentée, le liche, limons le mérou, la daurade etc.

 

{mainvote}