Le site est malheureusement fermé depuis quelques années pour des questions de sécurité (des blocs de grès se détachent). Même si c’est difficile à imaginer, ces grottes ne sont pas naturelles, mais sont des excavations pratiquées de main d’homme à l’époque punique puis romaine.
Le grès d’El Haouaria a été essentiel au développement et à la construction de la ville de Carthage. Les esclaves étant une main d’oeuvre abondante et gratuite, ils ont été utilisés sans aucune pitié pour creuser puis faire remonter à la surface les gigantesques blocs à travers des cheminées et des conduits taillés dans la roche. Ces blocs étaient ensuite acheminés par bateau de l’autre côté du Golfe de Tunis.
A l’époque romaine, ces carrières souterraines étaient appelées des latomies, de grandes grottes obscures où les esclaves étaient descendus de la surface attachés, et où souvent, aveugles, ils allaient mourir d’épuisement et de sous alimentation. Mais c’est bien connu, le progrès se fait toujours aux dépends de quelqu’un…

Les pierres étaient taillées dans la masse, il en reste d’ailleurs les traces dans le grès des grottes. La carrière tire son originalité du fait qu’elle était souterraine mais également que les puits par lesquels étaient remontés les blocs – et descendus les esclaves – étaient carrés à leur embouchure à la surface. On retrouve des descriptions du mode de fonctionnement de ces carrières dans la littérature de l’époque, notamment chez Diodore de Sicile.
Exploitée durant plus de 1000 ans, la carrière a fourni du grès à toutes les constructions puniques et romaines en Tunisie, on retrouve également des blocs recyclés dans presque tous les forts de la médina de Tunis et dans certaines mosquées. Le colisée de Rome est un des monuments les plus majestueux et les mieux conservés de l’antiquité romaine : il a été presque entièrement construit à partir du grès des carrières de Ghar el Kébir.

Aujourd’hui, les ouvertures d’antan n’existent plus, le site ayant été bombardé par les Américains durant la seconde guerre mondiale, car servant de refuge à l’armée allemande en déroute. De nombreuses ouvertures latérales se sont faites et ont été sécurisées et aménagées pour accéder sous terre.
Il est fort dommage que la sécurisation du site tarde tant car ces grottes représentent un potentiel historique à même de dynamiser le tourisme culturel régional. En attendant que ce soit fait, vous pouvez toujours profiter de la superbe région d’El Haouaria et du site punique de Kerkouane non loin de là.

S.S

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