On parle de développer le tourisme vert et le tourisme culturel “hors des sentiers du tourisme de masse”,  encore faudrait-il que les touristes n’aient  pas la désagréable surprise,  au détour d’un site millénaire,  de côtoyer couches usagées, boîtes de tomates concentrées,  emballages de paquets de cigarettes, bouteilles de lait ou d’eau… et j’en passe…

L’écologie et la protection de l’environnement ne seraient- elles  pas une priorité dans un pays à redresser économiquement ?… Cependant la qualité de notre environnement influe directement sur notre santé et sur celle des générations futures. La santé des Tunisiens ne serait-elle donc pas une priorité ? Et le chômage n’est-il pas lié à une conjoncture économique et l’économie n’est-elle pas basée en partie sur le tourisme ? La collecte des déchets et leur traitement ne sont-ils pas créateurs d’emplois ?

Que ce soit dans les quartiers chics de Gammarth ou de Mutuelleville,  ou encore en pleine campagne, prêt de Oudhna, de Sejnane, de Sousse… le constat est le même : les déchets domestiques sont déversés directement dans la nature. Ici c’est un canyon, ici un oued, là-bas un marécage ou une zone humide qui accueillent ces cadeaux empoisonnés! S’agit-il d’une mauvaise, voire d’une absence totale, de gestion des déchets ? Certainement !

Entre l’absence de bennes adaptées, les conditions dans lesquelles les usagers jettent leurs ordures  (à même la benne, quand elle existe, sinon à même le sol sans aucun sac hermétiquement fermé) et les conditions dans lesquelles,  chaque matin,  les éboueurs en tracteur collectent à la main, au mieux, à la pelle, nos détritus ménagers, il y a de quoi se poser des questions. Quand on voit aussi comment le traitement des déchets domestiques se résument dans les banlieues des grandes villes (Sousse, Mahdia …) à tout simplement mettre le feu aux décharges, on se demande combien de cancers des poumons et de leucémies  nous préparons,  doucement mais surement,  par ce biais ? Il est peut-être temps que les municipalités, le Ministère de l’Environnement, s’il existe encore, et,  de façon plus générale,  les collectivités locales,  considèrent la gestion des déchets comme une nécessité de base au même titre que la santé ou l’éducation.

Bientôt un problème de santé publique

Il ne s’agit pas de jeter la pierre aux autorités mais d’alerter sur un problème qui va rapidement devenir un problème important de santé publique. Or,  dans cette bataille,  chaque citoyen a sa pierre à apporter à l’édifice car, pour l’essentiel, il s’agit de sensibiliser et d’éduquer chaque citoyen à l’environnement. Combien de parents  condamnent  leur progéniture et leur explique la nécessité de ne pas jeter à terre leurs emballages de chewing-gum, Prince et chips ? Combien de crèches  font des sorties « nature »  et laissent derrière elles les poubelles du pique-nique? Combien de citoyens jettent  piles, matière toxique, etc. dans les poubelles de leur quartier par ignorance du danger ou par flemme de trouver un point collecte ?

La société civile, qui a bien souvent une longueur d’avance sur la machine administrative, s’est déjà organisée et on a vu fleurir cet été des journées  nettoyage de plages, des journées Tunisie propre, etc. Certains partis, minoritaires, ont également adopté la protection de l’environnement dans leur programme politique afin d’intégrer des lois environnementales et écologiques dans la nouvelle constitution.

Le » Réseau Associatif pour la Nature et le Développement en Tunisie « (RANDET) constitué au lendemain de la Révolution et le » Groupe Eco-constitution », groupe d’écologistes militants , ont lancé, mi-octobre, un appel urgent pour sauver l’environnement en Tunisie, exposé aujourd’hui à de nombreuses menaces. Plus de deux mille hectares de forêts tunisiennes, déjà rares, ont été incendiées ou déboisées depuis le 14 janvier, des parcs nationaux tels que Ichkeul, Bouhedma et Châambi, abritant une diversité de faune et de flore sauvage menacée, ont été attaqués et saccagés et des déchets, de tous genres, prolifèrent dans les quartiers résidentiels.Plusieurs zones industrielles, des champs agricoles et des établissements industriels déversent, sans traitement préalable, leurs rejets polluants dans la nature, « profitant d’une quasi-absence de contrôle des administrations centrale et locale ».

Il serait temps que le Secrétariat d’Etat à l’Environnement et les organismes publics concernés (Ministère de la Santé, de l’Education, de l’Agriculture…) fassent leur travail, condamnent de façon exemplaire les infractions et délits et sensibilisent chaque citoyen à la nécessité de protéger ensemble notre environnement.

Aurélie Machghoul

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