Les ASM sont avant tout un lieu de rencontre et de production d’idées pour tous ceux qui sont attachés à la Tunisie plurielle. Entretien avec Habib Kazdaghli, historien,  qui vient de démissionner de l’ASM de Hammamet en guise de contestation contre certaines dérives qu’il  a enregistrées. Entretien.

Mille et une Tunisie : Pourquoi avez vous démissionné de  l’ASM d’Hammamet ?
Habib Kazdaghli: J’ai démissionné du bureau élu de l’ASM vendredi 18 mars en signe de protestation contre les dérives autoritaires et despotiques qui se sont manifestées  dès les premières réunions du nouveau comité directeur. Notre peuple a fait sa révolution contre le despotisme du parti unique, du chef unique et de la pensée unique.

Depuis 37 ans de vie citoyenne et publique, je n’ai jamais accepté et je n’accepterai  jamais de me plier à aucune forme de despotisme de quelque nature  et  de quelque origine que ce soit .  Depuis 1979 et en ma qualité d’historien spécialiste des questions de mémoires plurielles et de patrimoine, j’ai accompagné cette association depuis sa fondation. J’ai apporté ma modeste contribution lorsque ce fut possible et m’en suis éloigné lorsque j’ai jugé que les meilleures conditions n’étaient pas réunies pour que j’y reste.

J’ai accepté de me porter candidat pour essayer de défendre des valeurs patrimoniales et protéger Hammamet. Depuis la réunion préparatoire de l’Assemblée générale, tenue le mardi 15 mars, qui avait réuni tous les candidats, je n’ai  cessé de défendre les principes de la pluralité, de la nécessaire intégration de toutes les compétences en matière de patrimoine, la convergence des bonnes volontés et la nécessité d’accorder une place aux compétences féminines.

Mille et une Tunisie : Que s’est –il passé ? On ne trouve aucune femme dans ce nouveau bureau de l’ASM de Hammamet. Où sont-elles ?
C’est un groupe qui ne connait rien de l’histoire de l’ASM et qui n’a  aucune notion sur la sauvegarde du patrimoine, qui a  fait une liste bloquée de 17 personnes et 5 jeunes femmes candidates sur ma liste ont été éliminées.
Dans l’association, nous sommes deux historiens à faire partie du bureau qui compte 17 membres. Nous avons essayé d’apaiser les esprits et avons distribué tous les postes après discussion et par consensus. Un conflit autour du poste du président a alors éclaté. Nous étions deux à y postuler. Docteur Mazlout, bien que de la même sensibilité que la majorité,  a fini par se désister  car il a dit honnêtement, qu’au vu de mes connaissances,  j’étais le plus habilité à présider l’association. Quelques éléments radicalisés ont refusé et demandé de faire la désignation par élection car ils savent qu’ils sont majoritaires.

Mille et une Tunisie : Pour vous cette démission est surtout une alerte ?
Absolument.  Ma démission est un appel pour les forces démocratiques, modernistes d’Hammamet et de toute la Tunisie, pour qu’elles se réveillent et s’unissent contre le fanatisme. L’ASM de Hammamet compte 377 adhérents, seulement 213 ont participé au vote. Il aurait suffit qu’une trentaine des 162 absents se présente pour balayer ces abus.
Cette démission est une alerte pour que toutes les forces démocratiques se réveillent et se mobilisent pour défendre les acquis modernistes et civilisationnels de la Tunisie indépendante et moderne. Il est capital de faire attention à protéger les réalisations de la révolution du 14 janvier des dangers qui la guettent. En aucune manière nous ne devons céder à la fatalité et accepter de remplacer un despotisme par un autre.

Propos recueillis par Amel Djait

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