Riche d’une expérience auprès de Philippe Stark, elle fonde son atelier et se déploie autour de l’architecture d’intérieur, de la scénographie et du graphisme. Depuis, elle connait de nombreux succès.
Pour la première fois, Matali Crasset s’attaque au bâtiment avec un hôtel contemporain et écologique dans le Sahara tunisien. Sa démarche reste pourtant la même. Elle commence par une réflexion autour de l’intention et de l’idée qui entourent le projet. Et c’est précisément ce qu’elle fait avec Patrick Elouarghi et Philippe Chapelet les promoteurs du nouvel hôtel de Nefta, le « Dar Hi ». Entretien pour comprendre le concept de cet hôtel maison d’hôtes.
Mille et une Tunisie : Si vous deviez définir le « Dar Hi » en tant qu’architecte-designer du lieu, qu’en diriez-vous ?
Matali Crasset : La Dar Hi est un hôtel maison d’hôtes pour appréhender la culture de l’oasis. C’est un lieu de retraite et d’ouverture en même temps. Retraite pour mettre son corps et son esprit à l’unisson et ouverture sur la culture tunisienne et sur la vie dans l’oasis. Le Dar’hi est un lieu où l’on doit pouvoir rester pour se mettre dans le rythme de la ville et très rapidement tout oublier. Nefta a cette capacité à nous absorber, la ville citadelle qui n’a pas changée et qui permet de retourner à l’essentiel.
Mille et une Tunisie : Dans quelle mesure votre architecture et conception du bâtiment considère et respecte la palmeraie et Nefta ?
Matalli Crasset : Le bâtiment est à échelle humaine. Ce n’est pas un grand ensemble qui vient se poser. On distingue d’abord un mur d’enceinte qui reprend la typologie des constructions locales mais dans la cour intérieure nous avons planté des maisons pilotis qui regardent vers la palmeraie. On distingue donc des petites “maisons” qui répondent et s’intègrent dans le tissu des maisons voisines qui sont aussi de petites tailles.
Mille et une Tunisie : Quel rapport avez-vous voulu par votre conception que le « Dar‘hi » entretienne avec la ville et la palmeraie de Nefta ?
Matalli Crasset Une partie des habitations qui forment comme un village sont en lien directe avec la ville et les petites ruelles qui l’entourent. Quand on arrive au Dar’hi on passe par les petites ruelles, l’entrée est discrète à l’image de celles des maisons qui l’entourent. L’autre partie des habitations donnent directement sur la palmeraie, comme enfouie dans le sable pour garder la fraicheur. Le désert permet l’introspection, surtout à Nefta. On surplombe la palmeraie. On voit au loin le chott et on laisse aller son imagination…
Mille et une Tunisie : Quelles ont été vos contraintes par rapport au fait que cet hôtel se situe en Tunisie ? A Nefta ?
Matalli Crasset Notre volonté de construire avec ce que l’on trouve sur place et de ne collaborer qu’avec des entreprises tunisiennes et des artisanats locaux, nous a permis d’affiner notre projet, de le rendre plus spécifiques.
Le projet propose un dialogue avec la culture tunisienne.C ‘est notre propre interprétation et de plus contemporaine. Le projet s’est déroulé sur plus de quatre ans, le temps nécessaire pour s’immerger dans la culture locale, pour apprivoiser le soleil et s’en protéger…pour comprendre en profondeur les reliefs de la vie proposés ici …
Le chantier du Dar’hi a duré deux ans.Le temps aussi d’apprendre à travailler ensemble et de fédérer autour du concept. C’est plus qu’un bâtiment c’est une aventure humaine.
Mille et une Tunisie : Pensez-vous que le Dar Hi peut renouveler les codes du tourisme en Tunisie?
Matalli Crasset Le projet de la Dar’hi est très décalé. Il est en rupture, par la taille. C’est un hôtel de petite capacité avec 17 unités de vie. D’ailleurs, je préfère employer le mot d’unité de vie que de chambres car l’espace intérieur et extérieur est aussi important; par l’emplacement dans la ville et la vie – L’hôtel est inscrit dans la ville, alors que les hôtels touristiques sont souvent dans des zones touristiques
Mille et une Tunisie : A quelle clientèle s’adresse le Dar Hi ?
Matalli Crasset Aux curieux. A ceux qui veulent réapprendre à donner du temps aux choses
Mille et une Tunisie : Qu’est ce que le PalmLab ?
Matalli Crasset Le « palm’lab » est un espace de recherche dédié au palmier dattier. Nous avons utilisé le palmier pour les espaces intérieurs pour faire du mobilier et des objets. Nous souhaitons continuer les recherches au niveau culinaire ainsi que pour les soins. Le « palm lab » comprend un espace de documentation dans l’hôtel. Il comprendra aussi un espace pour faire des essais et des ateliers dans la palmeraie.
Propos recueillis par Amel Djait
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