Exotic Spirit

Dans la boutique Exotik Palm Spirit, à la Soukra, le couple propose un heureux mélange « d’exotisme » dosé et d’innovation à partir de patrimoine de toute une région. Complètement inscrite dans une démarche de commerce équitable, la boutique apporte un éclairage nouveau sur une région : le Sud tunisien. Pour Mille et une Tunisie, Gilles Hergat revient sur la philosophie de sa marque. Il affirme son engagement à soutenir un patrimoine en mouvement. Une ligne à suivre de prés !

Mille et une Tunisie : Quel est le concept de votre boutique ?

Gilles Hergat : Il s’agit en fait de trois concepts : Objets artisanaux du Sud, Innovation et Ethique. Nous sommes le lien entre des maîtres artisans de renom, essentiellement du Grand Sud et une clientèle exigeante sur la qualité et sur l’éthique. Nous proposons des meubles en bois de palmier, des tapis (bernoug, kilim, margoum), des objets en verre fusionné, des pièces sculptées en marbre ou en pierre, de la maroquinerie, etc. Du traditionnel portant label (bernoug) jusqu’au personnalisé sur commande, en passant par les créations tendance réalisées en petites séries, nous supervisons tout cela.
Mais l’innovation, pour nous, ce n’est qu’accessoirement rendre hommage à la mode. Plus profondément, il s’agit pour nos artisans-partenaires de s’exprimer en tant qu’artistes mais aussi, et c’est là un point très important, d’assurer la pérennité d’un savoir-faire dont ils sont les dépositaires et dont ils sont responsables pour les générations à venir.

Mille et une Tunisie : Et comment vous y prenez vous?

En créant des objets adaptés aux exigences de notre vie pratique. Un exemple : le « haïk », ce voile de laine vierge dont se couvraient autrefois les femmes du Sud, est tombé en désuétude. Il était sans doute appelé à disparaître avec la dernière génération de femmes qui le portent encore. Mais le « haïk » innove aujourd’hui. Il se fait poncho ou châle, il investit les intérieurs coquets : rideau, jetée de canapé ou chemin de table… La tradition ne meure pas parce qu’elle se renouvelle. C’est un principe qui nous semble essentiel.

Mille et une Tunisie : Vous êtes aussi une marque qui s’engage dans le commerce équitable et par voie de conséquence dans le développement durable?

L’éthique est ici inséparable de l’acte créateur ; mais aussi de tout le travail en amont comme en aval, qu’il soit commercial, logistique, administratif, technique, etc. D’abord, Exotic Palm Spirit, c’est du commerce équitable. Aujourd’hui, tout le monde sait ce que c’est, et de plus en plus, les gens veulent être des consommateurs responsables.
Concrètement, dans notre cas, commerce équitable et développement durable – le second étant impliqué par le premier – signifie contribuer, dans une région qui, contrairement au Nord, ne connaît pas la prospérité, à rendre économiquement viable un savoir-faire pluriséculaire, un patrimoine vivant, en permettant à des artisans de talent d’être appréciés dans le Tunis chic comme en Europe.
On leur permet ainsi de vivre dignement de leur art, avec en plus, et ce n’est pas négligeable, cette satisfaction morale d’être reconnu par des dizaines de personnes de par le monde. Pour ce qui est du développement durable, l’essentiel est induit par le seul fait de respecter les principes du commerce équitable ; il n’y a pas lieu de s’y attarder. On se contentera ici de citer ce principe qui est appliqué de manière systématique : à chaque palmier coupé, un palmier planté. Le souci écologique d’Exotic Palm Spirit rejoint ici les exigences de l’Etat tunisien : coupe et replantage sont effectués sous le contrôle strict de la Direction régionale des Eaux et forêts.

Mille et une Tunisie : Comment et pourquoi avoir choisi de vous focaliser sur l’artisanat du Sud tunisien ?

Pourquoi tombe-t-on amoureux ? Je suis un amoureux de la Tunisie, pays dans lequel je vis depuis plus de 30 ans déjà. J’aime le Sud. Et j’aime ma femme, qui est tunisienne, et qui est du Sud. Beaucoup de choses m’ont séduit. A l’image d’une oasis qui semble surgir du néant, la création dans un milieu aussi hostile que le désert a quelque chose de fascinant : cette profusion, cette force, cette harmonie au milieu de rien, c’est extraordinaire !
D’un point de vue culturel, humain, c’est tout sauf le désert. La plupart des gens n’en soupçonne pas la richesse. Le Sud tunisien est la lente sédimentation de cultures berbères et négro-africaines plurimillénaires, en un tout qui est irréductiblement, vigoureusement arabe. J’ai vécu les vingt premières années de ma vie en Afrique subsaharienne ; ça m’a donné une sensibilité particulière. Je pense aussi que le sens, le sens profond – des choses, ou de la vie -, se trouve dans des endroits pareils. Ce n’est pas un hasard si presque tous les prophètes viennent du désert, comme si le sens devait jaillir entre deux infinis : celui du sable et celui du ciel.

Mille et une Tunisie : Quelles sont les caractéristiques des produits que l’on retrouve dans votre boutique?

Les matériaux : le bois de palmier, pour les meubles. La laine de mouton, de chèvre ou de dromadaire, pour les étoffes (haïk). Les teintures, qui sont toutes d’origine naturelle : grenade, henné, cactus. Et puis l’essentiel, qu’il est difficile de décrire : les motifs, les formes, les couleurs héritées ou réinventées, et la technique des maîtres, qui permet d’obtenir des objets d’excellente facture.

Mille et une Tunisie : Pensez-vous que ces objets à forte présence ethnique puissent s’intégrer dans des décorations modernes ?

Oui, indubitablement. Si ce n’était pas le cas, Exotic Palm Spirit n’aurait jamais rencontré sa clientèle ! Si on observe les choix des clients, nous pouvons distinguer trois types de stratégies : ceux qui veulent des matériaux nobles et des formes dépouillées — quelque chose de zen—, qui s’intègrent, pour ainsi dire, naturellement. Il y a ensuite ceux qui recherchent la chaleur, les couleurs, les motifs de l’objet original : authentique pour les uns, exotique pour les autres. Dans les deux cas, sa présence irradie, communique une sorte de vibration qui participe de l’âme de la pièce.  Enfin, il y a ceux qui ont une idée, une idée précise, originale, un peu folle ou simplement une idée à eux, et qui souhaitent en confier la réalisation à un maître artisan. C’est notamment le cas pour les meubles en bois de palmier. Il faut souligner que dans notre maison, la personnalisation sur commande a beaucoup de succès. Nos clients ont du goût. Ils ont, de plus en plus, une idée très précise de ce qu’ils désirent et souhaitent être entourés d’objets qui ont une âme et une histoire.

J’aimerais rajouter par rapport à cette notion de modernité et d’artisanat que nous allons être présents en 2011 sur différents Salons internationaux dédiés à la décoration et au design : “Maison&Objet” à Paris en janvier, “Ambiente” à Francfort en février et “Tendence” à Francfort également en juillet. Cette participation à ces prestigieux Salons est pour nous à la fois une reconnaissance de notre démarche, de la qualité et du design de nos produits mais également un test par rapport au regard européen.


Mille et une Tunisie : L’innovation ne risque-t-elle pas de porter préjudice à la dimension patrimoniale des objets que vous vendez ?

Non. Parce que les dangers qui guettent la production artisanale — et par là même sa dimension patrimoniale — sont d’une nature tout autre. Il s’agit de prendre garde aussi bien au tarissement de la demande qu’à la folklorisation.
Le premier a déjà été à l’origine de la disparition de nombreux savoir-faire, voire de corps de métiers entiers. Plus sournois, le second n’en est pas moins dangereux : la folklorisation, c’est le figement jusqu’au ridicule de la création artisanale. Je songe évidemment à ces objets pour touristes qui emplissent les souks : authenticité de pacotille et mauvaise facture qui peuvent conduire à terme à l’appauvrissement des savoir-faire et à une conception folklorisée, «exotisée» de sa propre culture. On peut comprendre évidemment que ces artisans-là subsistent essentiellement grâce au tourisme. Mais on ne peut admettre qu’un artisanat aussi riche que l’artisanat tunisien puisse, au moins pour certains de ses secteurs, se voir enfermer dans un carcan qui le condamnerait, à terme, à devenir une caricature de lui-même.
La voie de sortie, c’est d’adapter les matières et les objets d’hier à nos besoins d’aujourd’hui. Et ça passe nécessairement par l’innovation. Mais l’innovation a ses règles. Ces règles ne sont pas écrites : le maître artisan les connaît intuitivement. Il sent. Il cherche, avance et arrive à la croisée des chemins. Son goût sûr — dans lequel vit encore l’esprit de ceux qui l’ont précédé — lui fait choisir telle voie plutôt que telle autre, parce que celle-ci précisément prolonge l’art dont il est le gardien et l’héritier.  Les processus créatifs sont très complexes et ce qui compte après tout, c’est le résultat et l’objet créé. Ce que nous proposons à vos lecteurs, c’est de visiter notre show room de La Soukra afin d’avoir une idée concrète de ce qu’est un artisanat moderne, c’est-à-dire : responsable, enraciné, fonctionnel et esthétique.

Propos recueillis par Amel Djait

Détails:

Exotik Palm Spirit , La Soukra – Tunis
Adresse :
Km13 Sidi Frej 2036 La Soukra


Description:
Boutique d’artisanat du Sud tunisien. Un large choix de tapis (klims-bernoughs-marghoums), des meubles en bois de palmier, des objets en pierre et marbre, de la maroquinerie, des tissages (haïk-rideaux-nappes-chemins de table), des tableaux et des tapisseries murales en laine de mouton, de chèvre et de chameau…


Le petit plus : Le Sud tunisien et son artisanat dans toute sa splendeur. Des pièces uniques, une vraie passion pour l’artisanat de Gafsa, Sidi Bouzid et Tozeur

Contact:

Tél.: (+216) 23 108 755 – (+216) 71 863 130

E-mail: contact@exotikpalmspirit.com

Site:  www.exotikpalmspirit.com

Plan de situation:

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